Dernier concombre du gar…

photo of cucumbers and tomatoes in wooden crates

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Dernier concombre du gar…

Avec les années, ma vue ne s’arrange pas, l’astigmatisme de naissance est compensée par la myopie, ce qui fait que je ne porte pas de lunettes depuis une dizaine d’années, un grand bonheur. Ceci dit, mon cerveau actif et imaginatif a appris à compenser ma vision quand même hautement défaillante en proposant les vues de mon esprit.
Par exemple, ce matin, je passais en revue le contenu de ma boite mail quand je suis tombée sur le poème du jour. (Je suis abonnée à deux de ces organisations.)
Le titre était: “last cucumber from the gar… (“dernier concombre du gar…)
La fin était tronquée par l’étroitesse de l’écran. Donc dans ce cas précis, ce n’était pas une défaillance de vue, mais mon cerveau a tout de même fait la gymnastique de remplissage:

le dernier concombre du garage, bien sûr.

J’ai trouvé que c’était un bon titre. J’ai été interpellée.

J’ai été transportée dans le garage de ma grand-tante en Bretagne. Un modeste bungalow dans la cité ouvrière du village.
On entrait dans cette maison par le garage qui sentait fort l’essence, le mazout, le chien et quelque chose de frais. A l’autre bout se trouvait l’entrée du jardin, un petit lopin de terre où ma Tante Renée et son mari faisaient pousser quelques légumes.
Mais surtout, à l’entrée de la porte intérieure qui donnait accès à la maison, elle entreposait ses légumes – quelques tomates, courgettes ou concombres – dans des cageots pour les garder au frais.
J’ai donc eu la vision de ces derniers concombres du garage dans la demi-pénombre de souvenirs d’enfance. Et puis j’ai passé la tête par la porte pour entrer dans le salon qui lui, sentait une autre odeur, aussi forte, de feu de cheminée. J’ai revu des scènes joyeuses de famille – les apéritifs des adultes, les cacahuettes pour les enfants, le feu dans la cheminée, il y a plus de quarante ans. J’aurais pu continuer ma visite, la cuisine avec une bouteille d’Evian sur le radiateur, un flacon de Chanel sur le frigo; monter l’escalier de bois et jeter un coup d’oeil à sa dernière création de couturière sur le modèle en bois, les épingles et les bouts de tissus colorés sur le plancher, la caverne d’Ali Baba de mes sept ans.
Je ne me suis pas attardée. Je suis retournée au dernier concombre du garage, puis à ma messagerie.

Puis j’ai ouvert le poème pour voir le traitement personnel de l’auteur. Et c’est là que j’ai reconnu mon erreur.

“last cucumber from the garden (in conversation w/ Julie Gezelle Patton)” par giovanni singleton

If ⎷tomorrow – ⎷yesterday = now
And maybe
If silence : ⎷voice = holla 7.7 billion
Then perhaps
Stillness + birds in flight = joy infinite

 

ma traduction:

Le dernier concombre du jardin
Par giovanni singleton

Si ⎷demain – ⎷hier = maintenant
Et peut-être
Si silence : ⎷voix = salut 7.7 billion
Alors peut-être
Tranquilité + oiseaux en vol = joie infinie

Nulle question de garage! Ni de concombre d’ailleurs.  Bien que l’équation mathématique m’aie bien plu, j’ai préféré ma petite visite chez ma Tante Renée en Bretagne il y a presque un demi-siècle. Autant vivre dans le flou artistique.

3 thoughts on “Dernier concombre du gar…

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