
LES CAROTTES
Lundi, je devais écrire un poème sur les carottes
Comme je n’avais chez moi ni sujet ni carottes
Je ne pouvais simplement pas les couper en dés
Les carottes et les poèmes vous font-ils peur ?
Mardi – j’ai trouvé une ancienne carotte
Qui chantait la complainte des légumes
Oubliés dans le fond du frigo
J’ai délivré la sorcière, triste, grise et poilue.
Mercredi, j’ai versé dans ma tasse un nuage
De lait (je lisais un roman anglais.)
Quel tapage dans ma tête ! Des carottes ! Des carottes !
De carottes toujours point. Choux de Bruxelles on a.
Jeudi – j’ai fait un mirepoix. Ajouté du bouillon
De vibrantes carottes de jardin, une patate douce
Une pomme de terre dorée, et encore des carottes,
Les crucifères en fleur, et étrangers. Pas de dindon.
Vendredi – j’ai ajouté des petit-pois, quelques lentilles,
De l’origan. J’ai réchauffé le tout. J’ai attendu
L’inspiration n’est pas venue. Les carottes sont cuites !
Pourquoi pensez-vous que les poèmes sont faciles ?
Samedi – j’ai réchauffé à nouveau la soupe.
J’en mangerais tous les jours ! Mais où est le poème ?
Quel tapage dans ma tête. J’ai cherché un bouquin –
De rimes, de vers, de cantiques, d’incantations j’ai saupoudré
Dimanche – les mots et les idées étaient bien absorbés,
Dans les légumes fondus, relevés d’ail, d’oignon et d‘origan.
Dans le bouillon sans dindon, tous les morceaux de la même taille.
J’y ai cherché avec ma louche, une structure à déclamer.
« C’est bien goûteux ! » « j’en reprendrais ! »
Y’a les carottes – mais toujours pas de poème.
Bonus:
Louanges pour Les carottes :
« Maintenant, tu me fais me demander si les pommes de terre sont colorées ! »
– Enid Kibbler
“‘Carottes’ est un sujet trop négligé dans la poésie moderne. Je suis tellement content que Victor Hugotte ait choisi de s’y attaquer.”
– Zob Gloop
“J’adore les poèmes qui prient le lecteur d’apporter quelque chose sur la table. Victor Hugotte a apporté des carottes et j’ai apporté des chatons. Cela a fait une lecture assez étrange, en toute honnêteté.”
– Le conte quotidien
Ceci est ma proposition pour l’Agenda ironique de février selon les consignes de Carnets Paresseux qui voulait des légumes, des jours de la semaine, quatre mots imposés (nuage, tapage, dindon, bouillon) et une image à colorier d’Elena Pavlona Guertick.
llustration : Elena Pavlona Guertick, Images à colorier : des légumes, Flammarion, 1935 Gallica/BnF
magnifique. 🙂
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Pour avoir la carotte ou le poème il faut marner, ce qui semble avoir été le cas 🙂 Bravo
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Je viens d’apprendre un mot! Marner,
Et oui, c’est la galère ! 🙂 Merci Mijoroy
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Ah si, y a poème ! et quel poème !
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Bien joué, Victor Hugotte ! 🙂
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Tsi hi (petit rire contrit) !
Je m’aperçois avoir omis de porter commentaire sur ce billet.
Somme toute, habile comme tu l’es, si tu as banané le poème, tu n’as pas carotté le sujet 😉
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